Accueil |
Table des matières |
Références |
Contact |
I - IntroductionRembrandt fut l'un des peintres qui réalisa le plus d'autoportraits tout au long de sa vie. Il nous est parvenu moins d'une dizaine de dessins pour une quarantaine de gravures et une quarantaine de peintures d'autoportraits proprement dits auxquels il faut ajouter environ une dizaine d'autoportraits qu'il inclut dans des peintures ou des gravures consacrées à des scènes de genre. Ce qui signifie que la plupart des dessins ou études préparatoires ont été perdus. Si à tous ces autoportraits on rajoute les portraits peints par ses élèves dans son atelier, Rembrandt est un des peintres baroques dont le portrait a été le plus dessiné, gravé et peint. Les autoportraits occupent une place particulière dans son œuvre. Ils lui ont permis de mettre au point sa technique de gravure à l'eau-forte, de poursuivre tout au long de sa vie ses recherches sur la peinture, d'étudier le visage et l'expression des sentiments, ils lui ont permis d'exprimer sa volonté d'indépendance et de liberté par rapport aux conventions établies, d'établir sa notoriété, de gagner de l'argent en les vendant car beaucoup de ses contemporains désiraient un portrait du maître et enfin ils jouèrent pour lui le rôle de journal intime et dévoilent sa personnalité.
On
peut, pour simplifier, distinguer trois périodes :
- la
période de Leiden (1620 – 1631). Il ne reste que cinq dessins
préparatoires. Il se représenta cinq fois dans des scènes de
genre et réalisa vingt-deux autoportraits en gravure et huit
autoportraits en peinture.
- la
période d'Amsterdam avant la mise en faillite (1632 – 1658). En
peinture et gravure, il se représenta quatre fois dans des
scènes de genre avant de réaliser vingt-cinq autoportraits en
peinture et onze en gravure.
- la
période d'Amsterdam après la mise en faillite (1659 – 1669).
Cette période fut pour Rembrandt une période de grande misère
physique et morale. Durant cette période, Rembrandt réalisa onze
autoportraits en peinture, un en gravure et deux en dessin.
Signature de RembrandtII - La période de Leiden (1620 – 1631)Le contexte historique (Leiden)Pendant que la France et l'Angleterre se déchirent et se ruinent durant la guerre de cent ans (1337 – 1453), les ducs de Bourgogne ont acquis et fondé les Pays-Bas bourguignons à partir de la fin du XIVe et du XVe siècle en regroupant les seigneuries formant les « Dix-Sept Provinces ». Après la domination bourguignonne, les « Dix-Sept Provinces » deviennent, au début du XVIe siècle, les Pays-Bas espagnols. Ils correspondent aux Pays-Bas actuels, la Belgique, le Luxembourg et la région Nord-Pas-de-Calais de la France. Pendant la période des ducs
de Bourgogne et la première moitié du XVIe siècle, le
commerce maritime se développa à partir du port d'Anvers et
sa région devint le centre du développement industriel, du
développement de l'imprimerie, dont la maison de Plantin à
Anvers, fondée par Christophe Plantin (1520 – 1589) fut le
fer de lance, et du développement de l'art (peinture,
gravure et sculpture). La peinture flamande se développe
dans les villes de Bruges, Gand, Anvers et Bruxelles. Les
principales figures en sont : Jan van Eyck (c.1390 –
1441), Hans Memling (c.1435-40 – 1494), Jérome Bosch (c.1450
– 1516) et Pieter Brueghel dit l'Ancien (c.1525 –
1569). On doit à la peinture flamande le développement de la
peinture à l'huile et le réalisme des représentations.
Pieter Brueghel peintre et graveur, l'un des fondateurs de
l'école flamande, disait « Peignez ce que vous voyez ».
Carel van Mander (1548 – 1606), peintre et écrivain flamand
raconte au sujet de Brueghel : « En
compagnie de son ami Franckert, Brueghel aimait aller
visiter les paysans, à l'occasion de mariages ou de foires.
Les deux hommes s'habillaient à la manière des paysans, et
de même que les autres convives, apportaient des présents,
et se comportaient comme s'ils avaient appartenu à la
famille ou étaient de l'entourage de l'un ou l'autre des
époux. Brueghel se plaisait à observer les mœurs des
paysans, leurs manières à table, leurs danses, leurs jeux,
leurs façons de faire la cour, et toutes les drôleries
auxquelles ils pouvaient se livrer, et que le peintre savait
reproduire, avec beaucoup de sensibilité et d'humour, avec
la couleur ... Il connaissait bien le caractère des paysans
et des paysannes ... Il savait comment les habiller avec
naturel et peindre leurs gestes mal dégrossis lorsqu'ils
dansaient, marchaient, se tenaient debout ou s'occupaient à
différentes tâches ... ». L'école d'Anvers au XVIIe
siècle est représentée par Pierre Paul Rubens (1577 – 1640),
Antoine van Dyck (1599 – 1641) et Jacob Jordaens (1593 –
1678). Rembrandt fut un peintre dans la plus parfaite
tradition de l'école Flamande.
Une
partie des dix-sept provinces des Pays-Bas espagnols à
majorité protestante se soulevèrent contre l'Espagne
ultra-catholique durant la guerre de quatre-vingts ans de
1568 à 1648. Leiden, seconde ville de Hollande et haut lieu
de l'industrie des tissus est assiégée par les troupes
espagnoles en 1573-74. Leiden ne fut pas prise, le siège fut
levé le 3 octobre 1574, mais un quart de sa population
mourut de faim et de maladie durant le siège. En 1581, sept
provinces menées par la Hollande proclament leur
indépendance et prennent le nom de République des Sept
Provinces-Unies des Pays-Bas. Une trêve est signée à Anvers
en 1609 et dura douze ans jusqu'en 1621. Si pendant la
guerre de quatre-vingts ans (1568 - 1648), eurent lieu de
nombreuses batailles terrestres entre les Provinces-Unies et
l'Espagne, de très nombreuses batailles navales opposèrent
les Provinces-Unies à l'Espagne et au Portugal pour briser
l'hégémonie navale de l'Espagne et du Portugal et pour
prendre le contrôle des routes maritimes. Six batailles
navales opposèrent les Provinces-Unies à l'Espagne en
1573-1574. En 1588, des navires des Provinces-Unies
participèrent aux côtés de la flotte anglaise à la lutte
contre l'Invincible Armada espagnole. Deux batailles navales
opposèrent les Provinces-Unies au Portugal entre 1601 et
1606. Trois batailles navales opposèrent les Provinces-Unies
à l'Espagne entre 1606 et 1615. Et enfin, dix batailles
navales opposèrent les Provinces-Unies à l'Espagne et au
Portugal entre 1621 et 1647. La guerre prit fin par le
traité de Munster en 1648, l'Espagne reconnaissant
l'indépendance des Provinces-Unies. Après 1648, l'Espagne et
le Portugal avaient perdu toute hégémonie sur les mers du
globe.
Les
guerres de religion qui provoquèrent le pillage d'Anvers en
1576, puis son siège en 1585 achevèrent la suprématie de la
ville. L'intolérance religieuse des catholiques fit émigrer
les éléments les plus dynamiques de la population, les
savants, les imprimeurs et la République des sept provinces
unies hérita de l'industrie et du commerce des Pays-Bas
méridionaux (la Belgique). La ville de Leiden connut une
très rapide expansion, peuplée de 15000 habitants en 1573,
elle comptait 45000 habitants en 1622. Pour remercier Leiden
de sa résistance héroïque lors du siège de 1574, Guillaume I
d'Orange, créa en 1575 l'Université de Leiden qui devint
très célèbre et fréquentée par les plus grands penseurs. En
plus d'être un grand centre de l'industrie textile, Leiden
devint un centre important de l'imprimerie et de l'édition
après la venue temporaire de Christophe Plantin invité par
l'Université de Leiden et la famille Elzevier venue de
Louvain. En 1613, deux théologiens de l'Université de
Leiden, Jacobus Arminius et Francescus Gomarus, se
querellent sur la question de la prédestination. Les
partisans d'Arminius, appelés les remontrants, sont
convaincus de l'action terrestre efficace sur un plan divin
de l'homme. Ils réussissent à prendre le pouvoir au conseil
municipal de Leiden. Dans les Provinces-Unies qui sont
majoritairement calvinistes, les deux courants coexistent,
les remontrants, calvinistes tolérants mais minoritaires et
les contre-remontrants, calvinistes rigoureux. Les
Hollandais profitent de la trêve pour panser leurs plaies,
se préparer de nouveau à la guerre et régler leurs querelles
religieuses. En 1618, le Synode de Dordrecht tranche en
faveur des contre-remontrants, aussitôt le gouverneur
Maurits prend le pouvoir à Leiden par la force et le père de
Rembrandt, remontrant, perd ses fonctions publiques. Si
certaines minorités religieuses sont tolérées, leurs membres
ne peuvent occuper des postes importants dans la société.
Johan van Oldenbarneveldt (1547 – 1619), ancien
collaborateur de Guillaume I d'Orange-Nassau, héros du siège
de Leiden et un des chefs des remontrants est arrêté sur
ordre de Maurice de Nassau, fils de Guillaume I, puis accusé
de trahison et exécuté en 1619. Le célèbre humaniste et
juriste Hugo Grotius (1583 – 1645) autre chef des
remontrants, ancien élève de l'Université de Leiden, est
arrêté. Il réussit à s'évader en se cachant dans une malle
de livres et à quitter le pays.
La peste était endémique
pendant tout le XVIIe siècle dans les Pays-Bas, avec des
pics d'activité. Pour la ville de Leiden, les pics
d'activité de la peste se situent en 1624-25, 1635-36,
1655, 1664. Malgré des mesures de confinement par
quartiers, la peste décime la ville en 1635-36.
Si la société
hollandaise faisait preuve d'une certaine tolérance
vis-à-vis des minorités religieuses et des penseurs
(savants, philosophes …), elle se montrait peu tolérante
vis-à-vis du mode de vie. Un mode de vie hors du commun
était très mal vécu. Nous citerons les exemples des
mendiants à Amsterdam et des peintres Torrentius et
bien sûr Rembrandt. « En 1613, la municipalité
d'Amsterdam avait interdit toute mendicité et ouvert
deux établissements de rééducation forcée, le Raphuis
pour les hommes et le Spinhuis pour les femmes » (Renouard de
Bussierre S. 1986 voir « Autoportrait en mendiant »). Le peintre
Johannes Symonsz (Jan)
van der Beeck (1659 – 1644) appelé Johannes
Torrentius, était un peintre d'Amsterdam. Il était
connu comme un des meilleurs peintres de nature morte. Il
était considéré comme ayant un mode de vie de libertin,
c'est-à-dire remettant en cause les dogmes établis, il
était un libre penseur. Il commit l'erreur en 1620 de
s'installer à Haarlem ville beaucoup mois tolérante
qu'Amsterdam. En 1627, il est arrêté, accusé de blasphème,
d'hérésie, d'athéisme, de satanisme, d'être membre des
Rose-Croix et de surcroît de graver ou peindre des œuvres
érotiques. Il est torturé, mis au cachot et condamné à 20
ans d'emprisonnement. Toutes ses œuvres sont détruites,
seule une toile lui survécut, la « Nature morte avec bride
de cheval »
(1614). En 1629, Charles 1er Roi d'Angleterre, grand
admirateur de Torrentius, réussit à obtenir sa libération
et le fit venir en Angleterre. Malheureusement,
Torrentius, traumatisé par ce qui lui était arrivé, ne
réussit pas à se remettre à la peinture. Il revint à
Amsterdam en 1642 où il mourut dans la misère en 1644.
Rembrandt fut traduit en justice et en 1658, toute la
bonne société d'Amsterdam profita de sa mise en faillite
pour se débarrasser de lui.
On
peut appeler cette période (1620 - 1631), la période
d'apprentissage et de perfectionnement. Ce fut une des
périodes les plus prolifiques. C'est durant cette période
qu'il mit au point sa technique de gravure à l'eau-forte et
qu'il étudia comment représenter un visage et l'expression
des émotions et sentiments.
Entre 1614 et 1620, Rembrandt est élève à l'école Latine de
Leiden. Il s'initie à la calligraphie et au dessin avec un
certain Henricus Rievelink (M. Taylor, 2007). En 1620, il
s'inscrit à l'université de Leiden sans y être assidu car
seuls le dessin et la peinture l'intéressent. En 1621,
Rembrandt commence un apprentissage de trois ans chez le
peintre de Leiden, Jacob van Swanenburgh (1571 - 1638) et
travaille également avec Joris van Schooten (1587 - 1651).
Il s'installe un atelier dans le moulin de son père. En
1624, il parfait sa formation en travaillant six mois à
Amsterdam chez Pieter Lastman (1583 - 1633) où il s'initia à
la peinture italienne dont Lastman était un grand
connaisseur, il travaille également avec Jan Pynas (1582 -
1631) ami de Lastman. De retour à
Leiden, il fondera son premier
atelier situé Langebrug 89 probablement avec Jan
Lievens (1607 - 1674), ami d'enfance. En
1628, Gerrit Doo (1613 - 1675) âgé de quinze ans devient son
premier élève. Doo était un jeune peintre très doué qui
réalisa un portrait
de Rembrandt dans son atelier de Leiden. Vers 1629,
Rembrandt acquiert une presse et commence une collaboration
avec le graveur Jan van Vliet (c.1605 - 1668) de Leiden,
collaboration qui se poursuivit plusieurs années après son
installation à Amsterdam. Durant sa période de Leiden
Rembrandt eut probablement quatre élèves supplémentaires.
L'atelier de Rembrandt et Lievens devint très vite leur
laboratoire de recherche et une ruche dans laquelle
l'activité de chacun stimulait le travail des autres. Rembrandt fut très vite reconnu comme un jeune
peintre très talentueux. Dès 1628, Aernout van Buchell (1565
– 1641), humaniste d'Utrecht écrit que Rembrandt était un
jeune peintre très prisé et avait une réputation
d' « enfant terrible » et il
s'inquiétait des conséquences d'un succès trop précoce.
Après avoir peint une toile, on lui conseilla de la
présenter à un amateur de La Haye, il lui porta la toile et
la vendit 100 florins. Après ce premier succès, l'appât du
gain l'encouragea à travailler avec la plus grande
assiduité. En 1629, Constantijn Huygens (1596 – 1687), homme
d'état, poète et musicien de La Haye, s'enthousiasme pour le
jeune peintre Rembrandt dont le nom était déjà connu des
riches amateurs et collectionneurs.
Quand un jeune peintre s'était formé, avant de s'installer
un atelier, il était supposé faire un voyage en Italie pour
découvrir la peinture des maîtres italiens. Mais les modèles
préférés de Rembrandt n'étaient ni Apollon ni Vénus, mais un
paysan, une serveuse de taverne et tous les pauvres hères
que l'on rencontrait dans les rues. Les véritables maîtres
de Rembrandt furent la nature et ses dispositions
exceptionnelles. Rembrandt dessinait et représentait ce
qu'il voyait autour de lui sans chercher à l'embellir, il était un peintre dans la plus parfaite tradition
de l'école flamande définie par Pieter Breughel dit
l'Ancien, l'un des fondateurs de l'école flamande qui disait
« peignez ce que vous voyez ». Le monde de
Rembrandt était limité à son atelier qui était son
laboratoire de recherche avec ses élèves et ses
collaborateurs, sa famille, le quartier dans lequel il se
promenait, observait la vie de ses concitoyens et trouvait
ses sujets de dessins. Son quartier s'étendit avec le
temps à la campagne autour d'Amsterdam et enfin la Bible
et ses récits. Rembrandt était très casanier, il ne fit
pas de grands voyages. Bien qu'habitant près du port
d'Amsterdam, il ne dessina aucun des grands voiliers qui
parcouraient le monde et faisaient la richesse
d'Amsterdam, seulement les barques et les « skutjes »
(voiliers à fond plat équipés de dérives qui étaient
caractéristiques de la Frise) qu'il rencontrait sur les
canaux lors de ses promenades. Rembrandt était un
travailleur acharné, il n'avait pas un grand train de vie
et ne faisait aucun effort de présentation. Il était
toujours habillé de sa blouse de peintre, pleine de taches
d'encre et de peinture et n'était pas gêné de côtoyer les
pauvres gens, les clochards … Son ami et mécène Jan Six
(1618 – 1700) lui conseilla sans succès de faire des
efforts de présentation. Rembrandt aimait l'argent et
gagna beaucoup d'argent. Malheureusement pour lui, il
avait une grande faiblesse, une addiction, il ne pouvait
s'empêcher de dépenser tout son argent pour acheter et
collectionner des œuvres d'art.
C'est probablement durant son passage de six mois cher
Pieter Lastman à Amsterdam que Rembrandt est initié à la
gravure. En 1625-26, à son retour à Leiden, Rembrandt
commence la gravure et imprime ses premières plaques en 1626
et 1627. C'est entre 1628 et 1631 qu'il va développer et
mettre au point sa technique de graveur avec Jan van Vliet.
Durant la période 1628 – 1631, Rembrandt réalisera environ
soixante-dix gravures (dont vingt-quatre autoportraits
gravés), soit presque le quart de sa production ! Les
années 1630-31 marquent un tournant décisif dans la carrière
de graveur de Rembrandt. C'est durant cette période qu'il
mit au point sa technique de l'eau-forte en réalisant
l' « Autoportrait
au chapeau et collerette » et sa technique
du report d'un dessin sur une plaque de cuivre en gravant la
plaque « Diane au
bain ».
Sa série d'autoportraits met en évidence l'extraordinaire
imagination de Rembrandt qui ne dessinait ou ne gravait
jamais deux fois de la même manière un sujet donné. Notons
pour finir que lorsque Rembrandt dessinait ou peignait un
autoportrait, il se regardait dans une glace et le dessin
ou la peinture étaient inversés. Mais dans le cas de tous
les autoportraits gravés, les tirages ne sont pas inversés
et Rembrandt nous apparaît tel que nous aurions pu
l'observer. En effet, s'il gravait d'après un dessin
préparatoire, pour garder la spontanéité de son trait, il
n'inversait pas son dessin lorsqu'il gravait, et donc le
dessin gravé sur la plaque est également inversé et le
tirage n'est pas inversé, et s'il gravait sa plaque en se
regardant dans un miroir et non d'après un dessin
préparatoire, son autoportrait gravé sur la plaque était
inversé et le tirage résultant est de nouveau un
autoportrait non inversé. Bien que la plupart des dessins
préparatoires aient disparu, il existe quelques cas
montrant que la gravure faite d'après un dessin
préparatoire n'est pas inversée et donc le tirage
correspond à un portrait de Rembrandt non inversé. Enfin,
certains de ses autoportraits gravés ont peut-être été
travaillés en collaboration avec Jan van Vliet ou certains
de ses élèves et certains sont en fait des portraits faits
par ses élèves.
Le contraste entre les dessins des différentes périodes est saisissant. Durant la période de Leiden, il se montre comme un étudiant désinvolte désirant découvrir la vie. Plus tard, avant sa mise en faillite, il se montre en peintre établi. L'autoportrait correspondant à la période de la mise en faillite montre le choc hallucinant que subit Rembrandt et le dernier le montre sans fard comme un vieillard. Rembrandt inclut ses premiers
autoportraits dans des peintures de groupes. Citons par
exemple son autoportrait
dans « La lapidation
de Saint Stéphane » (1625), son autoportrait
dans la « Scène
historique » (1626) et son autoportrait
dans « Laissez
venir à moi les petits enfants » (1627),
son autoportrait
dans « David
remettant la tete de Golith à Saul » (1627).
Signalons également la peinture « Le
peintre dans son atelier » (1628) bien que
ce ne soit pas un autoportrait. Entre
1628 et 1631, il réalisera huit autoportraits en
peinture.
Dans ses premiers autoportraits peints, Rembrandt nous livre avec beaucoup de naturel les grands traits de sa personnalité. Dans l' « Autoportrait en soldat riant » (circa 1628), il nous montre son côté joueur, qu'il avait un grand sens de l'humour, qu'il aimait faire la fête, se déguiser et n'avait pas peur de l'autodérision. Dans, par exemple, l' « Autoportrait au visage ombré » (circa 1628), ou dans l' « Autoportrait la bouche ouverte » (circa 1629), Rembrandt se peint une partie du visage et les yeux dans l'ombre. Cette manière peu commune montre de la part de Rembrandt une certaine timidité et une certaine malice et même provocation. En effet il semble dire : « Vous ne me voyez pas, mais moi je vous vois ! ». Dans les peintures, « Autoportrait au béret orné d'une plume » (circa 1629) et « Autoportrait en costume oriental avec un chien » (circa 1631) Rembrandt se déguise. Au cours de sa vie, il gardera cette manière, la malice et la provocation dans certains de ses autoportraits. Par contre dans ses premiers autoportraits gravés de la période de Leiden, on retrouve souvent une partie importante de son visage qui disparaît dans les ombres trop intenses, mais ceci est dû à son absence de maîtrise de l'eau-forte qu'il découvre. Il ne sait pas encore faire des dégradés ou des détails dans les ombres ou les zones sombres. La caractéristique première des dessins de Rembrandt est la liberté du trait. La technique de gravure qui permet de conserver cette liberté du tracé est l'eau-forte. De nos jours, pour réaliser une eau-forte, le graveur recouvre une plaque de métal (du cuivre ou du zinc, le cuivre dans le cas de Rembrandt) d'un vernis. Lorsque le vernis est sec, le graveur dessine sur la plaque avec un pointe de métal très fine qui enlève le vernis. Lorsque le dessin est fini, il protège le dos de la plaque avec du vernis et la plonge dans de l'acide qui va attaquer le métal là où le vernis a été enlevé. Lorsque l'attaque à l'acide est finie, il enlève le vernis et les traits du dessin apparaissent en creux dans le métal. Le graveur recouvre la plaque d'encre, puis essuie la surface de la plaque de telle manière que l'encre reste uniquement dans le creux des traits. Le graveur place la plaque sur la presse, la recouvre de papier humide et la passe dans la presse qui produit une forte pression. La pression due à la presse comprime le papier dans le trait de la plaque et l'encre se fixe sur le papier. Avant de présenter la période de Leiden, nous présenterons la technique de l'eau-forte au moment où Rembrandt commença à graver. Pour illustrer la période de Leiden, nous présenterons « Les autoportraits à tête découverte », puis « Les autoportraits à tête couverte » et « Les autoportraits d'expression de sentiment ou d'émotion » et enfin « L'autoportrait au chapeau et collerette » qui permit à Rembrandt de mettre au point sa technique de l'eau-forte. On remarquera les progrès exceptionnels réalisés par Rembrandt au cours des trois années 1628, 1629 et 1630 en admirant les gravures « Autoportrait aux cheveux volants » (circa 1631), « Autoportrait à l'épais chapeau de fourrure » (1631), « Autoportrait les yeux écarquillés » (circa 1630) et enfin l'« Autoportrait au chapeau et collerette » (1631). Nous terminerons en présentant l'importance de la collaboration de Rembrandt avec J. van Vliet et l'apport de Rembrandt à la technique de l'eau-forte. La technique de l'eau-forte avant RembrandtLa technique de l'eau-forte fut développée par les orfèvres arabes en Espagne et en Syrie à Damas. Le métal est recouvert d'un vernis plus ou moins transparent qui reste mou, appelé le vernis mol. L'utilisation d'un vernis mou rend le travail très délicat, en effet si l'on pose la main ou les doigts sur le vernis celui-ci colle au doigt et quand on verse l'acide sur la plaque, l'empreinte du doigt se retrouve gravée. L'acide utilisé est l'acide nitrique, anciennement appelé eau-forte, ce qui donna le nom au procédé de gravure. De nos jours, pour attaquer le cuivre, on utilise le perchlorure de fer beaucoup moins toxique que l'acide nitrique. De nos jours, après avoir protégé le dos de la plaque, celle-ci est immergée dans un bac qui contient l'acide.
Masso Finiguerra (1426 – 1464), orfèvre et graveur
italien, voulut contrôler son « Triomphe
et le Couronnement de la Vierge, enlevée au ciel et
entourée d'anges » (1452), avant de
remplir les traits de nielle, il voulut essayer ce que
produiraient sur une feuille de papier humide les
figures gravées en remplissant les traits avec de la
fumée d'une chandelle. Le papier rendit fidèlement le
sujet tracé sur le métal. Cette technique, qui consiste
à remplir les creux gravés sur le métal avec de l'encre,
s'appelle la taille-douce. Le nielle est un sulfure
d’argent noir que l'on incruste dans les gravures d’un
métal précieux. Andrea Mantegna (1431 – 1506), peintre
et graveur italien est avec Masso Finiguerra, considéré
comme l'inventeur de la gravure sur cuivre
(chalcographie) en Italie. Il grava au burin (voir par
exemple «
La descente aux limbes
» de 1475). La gravure sur
cuivre se diffusa en Italie, en Bourgogne, dans les
Flandres et le long de la vallée du Rhin.
Daniel Hopfer (1470 – 1536), armurier et graveur
allemand, fut le premier qui eut l'idée d'utiliser la
technique de l'eau-forte pour imprimer des images (voir
par exemple « Trois vieilles
femmes battant le diable »).
La gravure sur plaque de métal se développa au début du
XVIe siècle (1513) en Suisse avec Urs Graff (1485 –
1527), en Allemagne avec Albrecht Dürer (1471 – 1528)
puis en Italie, à partir de 1530, avec Francesco Mazzola
(1503 – 1540). Elle devint très vite un des moyens
favoris des peintres graveurs. Au début du XVIIe siècle,
le graveur hollandais Simon Frissius (c.1570-75 –
c.1628-29) (voir par exemple « Paysage »)
et le graveur suisse Matthäus Merian dit l'Ancien (1593
– 1650) qui commencèrent l'eau-forte vers 1610-15 sont
considérés comme les premiers grands graveurs à
l'eau-forte qui obtenaient des tirages que l'on pouvait
comparer aux tirages obtenus en gravant au burin (A.
Bosse 1645).
Pour
reproduire
en gravure, un dessin, une peinture ou un paysage, il
est tout d'abord nécessaire de dessiner l'inverse du
dessin, de la peinture ou du paysage. Puis, le graveur
reporte sur la plaque le dessin inversé pour que le
tirage sur le papier corresponde au dessin original.
Pour cela, il est nécessaire de réaliser un calque ou un
contre-tirage du dessin inversé à graver sur le vernis
de la plaque pour obtenir un tirage non inversé. Mais
Rembrandt qui voulait garder la liberté du trait et la
spontanéité d'un premier dessin, ne réalisait jamais
deux fois le même dessin lors d'une étude d'un sujet ou
d'un thème et dessinait directement sur la plaque sans
inverser le dessin lorsqu'il gravait. Ses tirages
apparaissent alors inversés, ce qui ne le dérangeait
aucunement. Néanmoins, il réalisa quelquefois le report
d'un dessin sur une plaque pour réaliser une gravure, ce
qui revenait à copier son dessin sur une plaque. Il
s'initia à la technique du report en réalisant la
gravure très grossière « Saint
Paul en méditation »
(1629)
avant de mettre au point sa technique du report lors de
la gravure « Diane au bain » (1630) que nous
détaillerons dans le chapitre « Scènes
de vie intimes ».
Le graveur français Jacques Callot (1592 – 1635)
améliora considérablement la technique de l'eau-forte en
introduisant :
1) en 1616-17, l'utilisation d'un vernis dur
transparent utilisé par les luthiers de Florence et de
Venise, ce vernis dur rend la gravure à l'eau-forte
beaucoup plus facile, car l'on peut toucher le vernis
ou poser quelque chose dessus sans l'abîmer. Après
avoir verni la plaque avec le vernis dur, l'on doit le
sécher en chauffant la plaque. Ce vernis fut très rapidement adopté par de
très nombreux peintres graveurs du XVIIe siècle et son
utilisation resta en usage jusqu'au début du XVIIIe
siècle (A. Bosse, 1645, édition de 1743).
2) L'utilisation de
l'échoppe, outil proche du burin, emprunté
aux orfèvres qui permet de réaliser des pleins et
des déliés. A la différence du
burin qui a une section carrée,
rectangulaire ou en losange et est taillé en
biseau, l'échoppe a une section ronde et est
également taillée en biseau (A. Bosse, 1645).
3) la technique des morsures multiples à
l'acide. En général, elle consiste à réaliser trois
attaques successives pour donner trois intensités
différentes aux traits et créer des dégradés et/ou
obtenir l'impression de volume. Plus on laisse la
plaque dans l'acide, plus profonde est l'attaque.
Dans un premier temps, on réalise une attaque
relativement courte puis on lave la plaque à l'eau,
on enlève le vernis de la zone à protéger avec un
charbon de bois de saule bien doux trempé dans
l'eau, en faisant attention de ne pas rayer la
plaque, puis on recouvre la zone dont on a enlevé le
vernis pour la protéger de l'acide avec le mélange suif-huile
que l'on applique au pinceau (le suif
est de la graisse d'animaux herbivores, que l'on
recueille par fusion; cette graisse fondue servait
autrefois à la fabrication de chandelles, de
bougies, d'onguents, de savons et de produits de
graissage). On verse de nouveau de l'acide sur la
plaque et on obtient une deuxième morsure plus
profonde. Enfin, on répète une troisième fois la
procédure (A. Bosse, 1645).
Gravure obtenue avec la technique des morsures multiples (A. Bosse 1645) L'utilisation
d'un vernis transparent permet une autre
manière, beaucoup plus simple que la technique
des morsures multiples, d'obtenir des traits
d'intensité différente pour rendre le volume. On
fait trois attaques différentes avec des temps
différents que l'on combine avec l'utilisation
de pointes de grosseurs différentes. Dans
un premier temps, on dessine très légèrement les
traits les moins intenses correspondant aux
zones généralement les plus éloignées du paysage
et/ou à des lignes de construction, puis on fait
une attaque assez courte à l'acide et enfin on
enlève le vernis de toute la plaque et l'on peut
éventuellement faire un tirage pour visualiser
cette première étape. Après avoir
dégraissé puis reverni la plaque, on dessine
plus lourdement les traits correspondant aux
zones intermédiaires et on fait une seconde
attaque plus longue dans l'acide. On enlève de
nouveau le vernis et on fait éventuellement un
tirage pour visualiser les deux premières
étapes. Enfin, on dégraisse et revernit la
plaque pour dessiner une nouvelle fois et faire
une troisième attaque à l'acide qui sera la plus
longue et produira les traits les plus sombres
correspondant souvent aux premiers plans et à
des zones ombragées du paysage.
Jacques
Callot était un graveur très célèbre.
En 1625, il reçoit une importante commande de
l'infante Isabelle Claire Eugénie, fille de
Philippe II, et gouvernante des Pays-Bas :
celle-ci souhaite en effet qu'il immortalise la
victoire espagnole lors du siège de Breda et de
la reddition de la ville.
Pendant son séjour aux Pays-Bas, il rencontra et
échangea avec des collègues peintres et
graveurs. Jacques Callot avait gravé entre
autres des clochards. Rembrandt connaissait et
admirait ses gravures de clochards
et en collectionna. Si ses innovations
techniques ne furent publiées dans le
« Traité des manières de graver en taille
douce » qu'en 1645 par Abraham Bosse
(c.1603 – 1676), élève de Jacques Callot, elles
devaient avoir été diffusées par le
bouche-à-oreille et étaient probablement
parvenues à Rembrandt.
Lorsque Rembrandt commença la gravure en 1625,
il n'existait ni produits ni méthode standards
pour graver et chaque graveur avait sa méthode
et ses propres produits. La pratique de la
gravure au XVIIe siècle était très complexe et
demandait un travail considérable. Il
n'existait pas de plaques de cuivre prêtes
pour la gravure. Il fallait savoir bien
choisir son cuivre, puis faire fabriquer et
polir la plaque par un chaudronnier. Si le
graveur devait polir une plaque ou une partie
de la plaque, il polissait la plaque avec du
grès pour commencer, puis avec de la pierre
ponce, puis avec une pierre à aiguiser douce,
puis du charbon de bois de saule et enfin il
terminait d'effacer les dernières rayures à
l'aide d'un brunissoir.
Avant de vernir la plaque, il fallait la
nettoyer et la dégraisser en la frottant soit
avec de la mie de pain rassis, soit avec de la
poudre de craie (on utilise maintenant le blanc
de Meudon) puis l'essuyer avec un linge bien
propre (si la plaque n'est pas bien dégraissée,
le vernis adhère mal et l'acide pénètre sous le
vernis). Pour
graver une plaque recouverte de vernis mou, on
plaçait la plaque sur un petit chevalet de table
pour éviter de toucher le vernis et on gravait à
la pointe comme on aurait dessiné ou peint sur un
chevalet de table. Lorsque l'on avait gravé le
dessin sur le vernis on attaquait la plaque avec
de l'eau-forte. Avant d'attaquer la plaque par l'acide,
on protégeait le dos de la plaque ainsi que ses
bords avec le mélange suif-huile. Pour
réaliser l'attaque de la plaque par l'acide, il
existait deux méthodes utilisées par Rembrandt. Ou
bien celui-ci était versé huit à dix fois sur la
plaque qui était posée sur un plan incliné
(Figure), ou bien on bordait la plaque avec de la
cire (on construisait un petit rempart de cire sur
le bord de la plaque), puis après avoir placé la
plaque à l'horizontal sur une table, on versait
l'acide sur la plaque, l'acide retenu par la
bordure de cire attaque le cuivre.
Manière de verser l'acide sur la plaque (A. Bosse 1645)De nos jours, après avoir protégé le dos de la plaque, celle-ci est immergée dans un bac qui contient l'acide. Lorsque l'attaque par l'acide était finie, pour enlever le vernis de la plaque, on chauffait la plaque pour ramollir le vernis et on l'essuyait avec un tissu imbibé d'huile d'olive.
« Vue d'Amsterdam » (1641), {Rijksmuseum, Amsterdam}.Pour graver au trait sur une plaque de cuivre, il existe deux autres méthodes également utilisées de manière complémentaire à la technique de l'eau-forte par Rembrandt. La première méthode est de graver la plaque avec un burin qui est une tige d'acier trempé dont la section est carrée, rectangulaire ou en losange. L'extrémité est sectionnée obliquement et soigneusement affûtée. On peut creuser dans la plaque de métal un sillon très fin ou très profond dont la taille est très nette et sans rebord, le métal est enlevé sous forme de copeaux. La technique du burin est la plus ancienne (née vers 1430) mais difficile à bien maîtriser. L'un des grands maîtres du burin est Albrecht Dürer (1471 – 1528). La seconde méthode est de graver la plaque à la pointe sèche. La technique de la pointe sèche utilise une pointe en acier qui sert à graver des traits dans la plaque de métal. La pointe est plus facile à manier que le burin, elle permet de retrouver une certaine liberté du dessin et d'obtenir de très grands dégradés dans les zones sombres. Contrairement au burin, la pointe sèche n'enlève pas le métal, elle le déplace, il se forme des bourrelets de métal de chaque côté du sillon créé par la pointe. Les bourrelets de métal retiennent l'encre et lors du tirage on peut obtenir au tirage des traits beaucoup plus noirs et très épais sur le tirage. Mais la plaque est plus fragile, car lors du tirage la pression de la presse écrase les bourrelets de métal. Notons pour finir, que l'attaque directe du métal ne permet pas d'avoir un trait aussi libre que celui obtenu avec la technique de l'eau-forte. Les autoportraits tête découverte « Autoportrait
penché vers l'avant » (gravure, circa 1629), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Cette
gravure est l'un des premiers auto-portraits
gravés. Elle très rudimentaire. On remarquera
sur le tirage les nombreuses petites taches
d'encre qui peuvent être dues soit à un
polissage insuffisant de la plaque, ou à une
maîtrise insuffisante du vernis mou. Cette
gravure est liée aux deux peintures l'« Autoportrait
au visage ombré » (circa 1628) et
l'« Autoportrait » (circa 1629).
« Autoportrait
à l'écoute penché vers l'avant » (gravure,
circa 1628), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Il
est très intéressant de comparer cette gravure à
l' « Autoportrait
penché vers l'avant »
(circa 1628). Dans cette gravure, on distingue
deux niveaux très différents dans l'intensité
des traits et des hachures. Rembrandt utilise
des pointes plus ou moins fines pour enlever
le vernis et réalise des attaques à l'acide
plus ou moins longues pour obtenir des traits
plus ou moins fins ou intenses.
« Autoportrait au nez large » (gravure,
circa 1628), {Rijksmuseum,
Amsterdam}.
« Autoportrait tête nue » (gravure, circa 1629), {Rijksmuseum, Amsterdam}. On voit que Rembrandt ne maîtrise pas encore les dégradés ou des détails dans les ombres ou les zones sombres. « Autoportrait
les cheveux rugueux » (gravure, circa
1630), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Cet autoportrait est dû à
Rembrandt avec peut-être la participation de
J. van Vliet.
« Autoportrait en cape
et col plat » (gravure, circa 1630), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Cet autoportrait est dû à
Rembrandt et la participation probable d'un de
ses collaborateurs.
« Autoportrait aux cheveux volants » (gravure, circa 1631), {Rijksmuseum, Amsterdam}. Les autoportraits peints
la tête découverte sont : l'« Autoportrait
au visage ombré » (circa 1628)
, l'« Autoportrait
au gorgerin » (circa 1629) et
l'« Autoportrait »
(circa 1629).
« Autoportrait au bonnet de fourrure »
(gravure, circa 1629), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Rembrandt ne maîtrise pas
encore les dégradés ou des détails dans les
ombres ou les zones sombres.
« Portrait de Rembrandt en fauconnier »
(gravure, circa 1628 – circa 1637), {British Museum,
Londres}.
Cette gravure ni datée, ni signée représente
un portrait de Rembrandt en fauconnier. Elle
très intéressante car elle est un bon exemple
des problèmes de datation et d'attribution.
Elle a peut-être été réalisée d'après une
œuvre de Rembrandt. Sa datation est estimée entre 1628 et
1637. Elle est actuellement attribuée à J van
Vliet. Précédemment elle a été attribuée à
Ferdinand Bol et avant à Isaac de Jouderville.
« Autoportrait à la
cape et au manteau » (gravure, circa
1630), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Autoportrait de Rembrandt
peut-être retravaillé par un de ses
collaborateurs.
« Autoportrait (?) au béret et plume »
(dessin, circa 1630, Benesch,
A 18a), {Musée du Louvre, Paris}.
Dessin à la plume et au pinceau, avec sanguine
et rehaut de blanc (la différence de couleur due
à la sanguine n'est pas visible dans cette
reproduction monochrome). Signé et daté 1630. Ce
dessin est particulièrement intéressant pour
plusieurs raisons. Il est considéré comme un
autoportrait par certains experts et comme un
dessin préparatoire de la gravure « Etudes »
datée de 1632 (voir les deux tirages suivants).
Mais d'autres experts, Benesch par exemple,
considèrent que c'est un dessin d'un élève de
Rembrandt. Cet autoportrait et les études
suivantes sont peut-être des variantes liées à
la peinture « Autoportrait
au béret orné d'une plume »
(circa 1629).
« Etude
d'autoportait (détail)
» (gravure, circa 1632), {Rijksmuseum,
Amsterdam}.
Détail
de la plaque « Etudes »
présentée ci-dessous.
« Etudes »
(gravure, circa 1632), {Rijksmuseum,
Amsterdam}.
Plaque d'études qui contient des études de
personnage, de têtes et un début
d'autoportrait.
«
Autoportrait
au chapeau vers avant » (gravure, circa 1630), {Rijksmuseum,
Amsterdam}.
« Autoportrait
au chapeau de fourrure » (gravure, circa 1630), {Rijksmuseum,
Amsterdam}.
« Autoportrait
au chapeau de fourrure » (gravure, 1631), {Rijksmuseum,
Amsterdam}.
Cette gravure est peut-être un autoportrait de
Rembrandt, retravaillé par J. van Vliet.
Les autoportraits peints la tête couverte sont : l'« Autoportrait au béret orné d'une plume » (circa 1629), l'« Autoportrait » (circa 1630) et l'« Autoportrait en costume oriental avec un chien » (circa 1631). Il est particulièrement intéressant de comparer son « Autoportrait » de c.1630 avec le « Portrait » exécuté en 1628 par Jan Lievens {collection privée}, en effet le portrait réalisé par Jan Lievens montre le visage de Rembrandt non inversé. Portrait de Rembrandt par J. Lievens (c. 1628), {Collection privée}
Les autoportraits d'expression de sentiment « Autoportrait la bouche ouverte
» (dessin, circa 1629, Benesch, B 53,
Schatborn, S 627), {British Museum,
Londres}. Dessin fait à la plume et
au pinceau. Ce dessin fut
suivi par la gravure « Autoportrait
la bouche ouverte »
et
les peintures « Autoportrait » (circa
1629a) et « Autoportrait
la bouche ouverte » (circa 1629b).
On remarquera de nouveau les trois manières
différentes de traiter le même sujet, méthode
caractéristique du travail de Rembrandt.
«
Autoportrait la bouche ouverte ou criant
» (gravure, circa 1629), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Rembrandt se représente
en train de crier. Gravure faite d'après le
dessin précédent « Autoportrait la
bouche ouverte ». C'est un
autre exemple d'un tirage non inversé d'un
autoportrait car Rembrandt grave sa plaque
sans inverser son dessin préparatoire.
« Autoportrait
regardant droit devant
» (gravure, circa 1630), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Il traduit toute la
colère et la rage que l'on peut ressentir
avant d'exploser.
« Autoportrait le
front plissé » (gravure, circa 1630),
{Rijksmuseum,
Amsterdam}. Cette gravure est une variante
de l'« Autoportrait
aux cheveux crépus »
(1628). Elle traduit l'irritation
devant une situation que l'on désapprouve.
« Autoportrait
souriant avec chapeau » (gravure,
circa 1630), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Cet autoportrait est une
variante de la peinture « Autoportrait
en soldat riant »
(1628).
« Autoportrait les
yeux écarquillés » (gravure, circa
1630), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Cet
autoportrait traduit l'étonnement et la
surprise.
Rembrandt s'entraîna à exprimer les émotions et sentiments en travaillant des autoportraits. Plus tard, une des ses grandes spécialités fut l'expression des émotions et des sentiments différents lors de la représentation de groupes de personnages, d'animaux et même de paysages. Nous allons présenter deux exemples de gravures réalisées après la période de Leiden, mais qui illustrent cette faculté exceptionnelle de Rembrandt et caractéristique de la période baroque. « Joseph racontant
ses rêves » (gravure, 1638), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Rembrandt
traita le thème de Joseph racontant ses
rêves en 1633 dans une peinture
à l'huile sur papier. Cinq ans plus
tard, il
reprend le thème en le gravant sans
inverser le dessin. Joseph, le
fils préféré de Jacob rêve dans un premier
temps, que les gerbes de la récolte des
ses frères se prosternent devant sa gerbe
et dans un second temps qu'il voit le
soleil, la lune et onze étoiles se
prosterner devant lui. Innocent, il
raconte ses rêves à son père, ses frères
et des voisins (c'est ce moment-là que
Rembrandt choisit de représenter). Ses
frères, jaloux de la préférence que leur
père accorde à Joseph, se mirent à le haïr
après l'écoute de ses rêves. Jacob ayant
envoyé Joseph voir ses frères, ceux-ci le
kidnappèrent et le vendirent comme esclave
à
des Midianites (peuple d'Arabie) conducteurs
de caravanes qui allaient en Égypte. Rembrandt
reprit le thème dans cette petite gravure
de 8 * 11 cm sans inverser le dessin du
tableau (le tirage se retrouve donc
inversé par rapport à la peinture). Cette
gravure est un modèle de virtuosité et
était très appréciée du vivant de
Rembrandt. Joseph entouré par son père,
ses frères et des voisins raconte ses
derniers rêves. La scène contient treize
personnages dont douze nous montrent leurs
visages. On admirera les différentes
expressions des personnages.
Détail de la gravure «
Le berger endormi » (gravure, 1644),
{Rijksmuseum,
Amsterdam}. C'est une petite gravure de
5,5 * 7,5 cm. Cette scène est probablement
la plus charmante et la plus réussie des
scènes d'expression de sentiments.
D'apparence simple, elle traduit les
expressions et les sentiments avec une
efficacité et une virtuosité
exceptionnelles. On voit le jeune garçon
(un soldat) pressé de faire un câlin à sa
belle, celle-ci plus timide veut s'assurer
que le berger ne va pas les voir. Le
berger qui ne veut pas déranger les
amoureux fait semblant de dormir. Même la
vache semble s'amuser avec bienveillance
en observant nos trois compères.
Enfin terminons avec une gravure d'autoportrait de scène. « Autoportrait en
mendiant » (gravure, 1630), {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Lors d'une de ses promenades,
Rembrandt rencontra probablement un mendiant
qui lui ressemblait et il décida de se
représenter en mendiant, montrant ainsi que
son cœur était proche des pauvres gens. Les citoyens d'Amsterdam
étaient des Puritains, qui admettaient
la liberté de pensée, mais refusaient
la liberté de conduite. « En
1613, la municipalité d'Amsterdam avait
interdit toute mendicité et ouvert deux
établissements de rééducation forcée, le
Raphuis pour les hommes et le Spinhuis
pour les femmes : le mendiant n'était
plus le pauvre du Moyen Age qui aidait le
riche à faire son salut, mais un asocial
dont l'existence était ressentie comme une
menace (Renouard
de Bussierre S. 1986) ». Cet
« autoportrait en mendiant »
pouvait être considéré comme une
provocation, mais était pour Rembrandt une
manière de montrer sa volonté de liberté
dans cette société très rigide. Si le XVIIe
siècle est appelé siècle d'or pour Amsterdam
et les Pays-Bas, la qualité de l'or n'était
pas la même pour les grands commerçants, les
marchands d'armes, les bourgeois et les
pauvres hères.
La mise au point de sa technique de l'eau-forteAutoportrait au chapeau et collerette (1631)
« L'autoportrait au chapeau et
collerette » est le premier
autoportrait gravé de Rembrandt qui le
montre en personnage important juste avant
son arrivée à Amsterdam. C'est probablement
l'autoportrait gravé qui fut le plus tiré
pour être vendu. Lorsque Rembrandt arriva à
Amsterdam en 1632 et que sa notoriété
s'établit, beaucoup de gens désiraient
acquérir un portrait de Rembrandt et cet
autoportrait lui servit de carte de visite
'payante' pour faire sa publicité et asseoir
sa notoriété.
C'est en réalisant cet autoportrait que Rembrandt mit au point sa technique de gravure à l'eau-forte. Les différentes étapes de son travail permettent de la comprendre ainsi que sa méthode de travail, comme on va le voir par les illustrations suivantes. Il existe quinze états gravés différents de cet autoportrait. Nous ne les présenterons pas tous, nous présenterons neuf des différentes étapes gravées et trois études dessinées, qui mettent en évidence l'énorme quantité de travail, de délicatesse et de virtuosité qu'il dut produire pour la réalisation de cet autoportrait. Pour réaliser cette gravure, Rembrandt utilise un vernis transparent et ce qui lui permet de faire plusieurs attaques successives à l'eau-forte, attaques qu'il prépare avec des pointes plus ou moins fines pour enlever le vernis et des attaques à l'acide plus ou moins longues pour obtenir des traits plus ou moins fins. Si c'est nécessaire il efface au brunissoir la partie de la gravure qu'il veut retravailler et enfin il renforce certaines ombres au burin et/ou à la pointe sèche.
Cet autoportrait montre que si Rembrandt
tâtonna plusieurs années pour maîtriser
l'art de la gravure à l'eau-forte, ses
progrès furent fulgurants au cours de
l'année 1630-1631, après sa collaboration
avec le graveur Jan van Vliet.
Lorsqu'il commence son autoportrait, il n'a pas d'idée précise de la tournure qu'il lui donnera. Pour commencer, Rembrandt grave sa tête couverte d'un chapeau. « Autoportrait
au chapeau et collerette » (gravure),
{Rijksmuseum, Amsterdam}. Il en fait
plusieurs tirages qui lui permettront de
dessiner pour imaginer la suite de sa
gravure. Il nous reste trois études
préliminaires dessinées.
« Autoportrait au
chapeau et collerette
» (dessin, Benesch, B 57, Schatborn, E
208a), {British Museum, Londres}. Première
étude dessinée pour son autoportrait.
Utilisant le tirage de la première étape,
Rembrandt imagine et dessine la suite de
la gravure. Cette étude est dessinée à la
pierre noire. AET 24 signifie
« Aetatis suae 24 »,
c'est-à-dire « A l'âge de 24
ans ». Le dessin étant fait en 1631,
cela indiquerait qu'il a été réalisé au
début de l'année 1631 avant l'anniversaire
de Rembrandt, le 15 juillet.
«
Autoportrait au
chapeau et collerette
» (dessin, Schatborn, E 208b),
{Bibliothèque nationale, Paris}. Seconde
étude dessinée, elle est également
réalisée à la pierre noire. On remarquera
que ces deux études sont différentes de la
version finale que choisira Rembrandt.
« Autoportrait
au chapeau et collerette
» (gravure),
{Britsh Museum, Londres}. Avant
d'aborder la gravure de son habit,
Rembrandt reprend la gravure de la tête
couverte d'un chapeau. Dans cette étape,
il travaille probablement au burin
plutôt qu'à la pointe sèche, les parties
sombres du chapeau, du visage et des
cheveux.
En effet cet autoportrait est celui qui
a été le plus tiré et les zones
travaillées à la pointe sèche s'écrasent
très rapidement au tirage, ce qui n'est
pas le cas des zones travaillées au
burin.
«
Autoportrait au
chapeau et collerette
» (dessin),
{Britsh Museum, Londres}. Puis il
dessine à la pierre noire une esquisse
de l'habit qu'il va graver (notons que
certains experts ne sont pas sûrs que
cette étude soit de Rembrandt lui-même).
« Autoportrait au
chapeau et collerette
» (gravure), {Bibliothèque nationale,
Paris}. A cette étape, Rembrandt a
construit le personnage et la forme
générale de son habit sans travailler ni
le décor de l'habit ni le fond de la
plaque. Il est suffisamment content de
cette étape pour la signer en haut à
gauche. Signature qui disparaîtra dans les
étapes suivantes et ne sera pas la
signature finale de la plaque.
« Autoportrait au
chapeau et collerette
» (gravure),
{Britsh Museum, Londres}. Dans cette
étape Rembrandt retravaille le manteau
sur son avant-bras gauche.
« Autoportrait au
chapeau et collerette
» (gravure), {Bibliothèque nationale,
Paris}. Dans cette étape, Rembrandt
travaille les broderies et les détails de
l'habit, du haut de son bras gauche, de
l'arrière du manteau et le bas de la
manche droite. Pour réaliser ces
broderies, il a d'abord dû effacer avec un
brunissoir les hachures de l'étape
précédente, ce qui représente un très gros
travail à réaliser avec beaucoup de
délicatesse et de virtuosité. C'est
l'exemple même d'une erreur de jeunesse
que Rembrandt prit garde de ne pas
répéter par la suite, ne pas couvrir de
hachures les zones qui doivent être
dessinées plus tard; voir par
exemple la gravure « Le
Christ devant Pilate (1) » et
« Le
Christ devant Pilate (2) »
(1635).
« Autoportrait au
chapeau et collerette
» (gravure), {Bibliothèque nationale,
Paris}. Dans
cette étape, pour rendre le volume,
Rembrandt travaille le fond de la plaque
qui donne la profondeur et la mise en
lumière.
« Autoportrait au
chapeau et collerette
» (gravure),
{Rijksmuseum, Amsterdam}. Dans
cette étape Rembrandt travaille les bords
du fond de la plaque et enlève les gros
défauts des bords de la plaque qui
existaient dans l'étape précédente. La
collerette est encore inachevée.
« Autoportrait au
chapeau et collerette
» (gravure),
{Rijksmuseum, Amsterdam}. Cette
étape correspond à la version achevée de
la gravure. Rembrandt finit la collerette
et signe la plaque en haut à droite.
Cette gravure fut suivie par deux autoportraits peints en 1632, un premier « autoportrait au chapeau et collerette » (1632a) et un second « autoportrait au chapeau et collerette » (1632b) ainsi qu'une copie dû à l'un de ses élèves.
« Autoportrait au
chapeau et collerette
» (gravure),
{Rijksmuseum, Amsterdam}. Le
dernier état connu de la plaque. La partie
la plus claire du fond a été effacée à
l'aide d'un brunissoir. Une eau-forte
gravée sur cuivre permet entre cent et
cent cinquante tirages avant que la plaque
écrasée par la pression de la presse ne
nécessite un nouveau travail de gravure.
Il montre l'état d'une plaque qui a été
tirée un très grand nombre de fois et dont
les traits ont dû être retravaillés au
burin pour compenser leur écrasement du à
la pression lors des tirages. Cet
auto-portrait eu tellement de succès
qu'il fut copié par Jan van Vliet en
1634 « Rembrandt autoportrait ».
Rembrandt
fait imprimer ses premières plaques en 1626 et sa
production de gravures ne commence sérieusement
qu'en 1628-29. Vers 1629, Rembrandt acquiert une
presse et commence une collaboration avec le
graveur de Leiden Jan van Vliet. Celui-ci avait
probablement une expérience et des connaissances
de la technique de gravure supérieures à celles de
Rembrandt, et c'est peut-être lui et sa
collaboration avec Rembrandt qui ont permis à ce
dernier son éclosion en tant que graveur durant
les années 1630-31. Il est possible, mais nous ne
le savons pas, que Jan van Vliet initia Rembrandt
à l'utilisation d'un vernis dur transparent, par
exemple le vernis des luthiers utilisé par Jacques
Callot, ou le vernis utilisé par les menuisiers ou
celui des charpentiers de marine. Il l'initia
probablement à la technique du report d'un dessin
sur une plaque et à l'utilisation du burin. Jan
van Vliet joua un rôle important car il fit
connaître l'œuvre
de Rembrandt en la gravant. La collaboration entre
Jan van Vliet et Rembrandt se poursuivit après son
installation à Amsterdam. Rembrandt inspira Jan
van Vliet pour le choix des sujets de ses
gravures, les mendiants (« Mendiant » c. 1632),
les scènes de la vie courante (« Les joueurs de
carte »
c. 1634), les scènes bibliques (« Le baptême
de l'eunuque
» c. 1631). Si
Jan van Vliet apporta à Rembrandt ses
connaissances de la technique de la gravure, il
n'avait pas l'imagination, l'originalité et la créativité de
Rembrandt.
En
1631, lorsque Rembrandt mit au point sa technique
de l'eau-forte avec son « Autoportrait
au chapeau et collerette », Jan van
Vliet était capable de graver avec le même niveau
de virtuosité comme le montrent ses gravures « Loth
et ses filles », « Le
baptème de l'eunuque »
et « Anne la prophétesse ».
"Lot et ses filles" (c. 1631), gravure de
J. van Vliet reproduisant le dessin "Lot
et ses filles" (c. 1631) de Rembrandt
ou de son atelier.
Rembrandt
n'aimait jamais dessiner deux fois la même chose
et il gravait sans inverser son dessin pour garder
la spontanéité du trait. C'est probablement Jan
van Vliet qui l'initia à la technique du report
d'un dessin sur la plaque vernie avant de la
graver lors de la réalisation de la gravure
« Diane
au bain ». (technique qui sera
expliquée dans le chapitre des scènes de vie
intimes lors de l'étude de la gravure « Diane
au bain »).
Jan van Vliet travailla avec Rembrandt pour la réalisation de gravures, par exemple « La décapitation de Saint Jean Baptiste » (c. 1631) et de ses deux plus grandes plaques « La grande descente de croix » (c. 1633) et « Le Christ devant Pilate » (c. 1635). Jan van Vliet joua également un rôle important pour faire connaître et diffuser l'œuvre de Rembrandt en la gravant (la gravure était le seul moyen de reproduction des dessins ou des peintures au XVIIe siècle). Citons par exemple, les gravures « Loth et ses filles » (c. 1631) et « Anne la prophétesse » (c. 1631-34), "Anne la prophétesse" (c.1631-34), {Rijksmuseum Amsterdam}"Anne la prophétesse" (c. 1631-34), gravure de J. van Vliet reproduisant la peinture "Anne la prophétesse" de Rembrandt (c. 1631).
ainsi que l'« Autoportrait
de Rembrandt »
(c. 1634) qui est la copie
de l'autoportrait de 1628 et la
copie de 1634 de l'« Autoportrait
au chapeau et collerette »
(c. 1631).
Hercules Segers
(Haarlem c. 1589-90, Amsterdam c. 1637-38)
est un peintre et graveur très original et
qui fut l'un des plus grands
expérimentateurs dans le domaine de la
gravure. Il eut une vie difficile, il connut
la faillite et eut une fin tragique. S'étant
mis à boire sur la fin de sa vie, il serait
mort de la suite d'une chute dans un
escalier. Samuel van Hoogstraten, dans son
« Introduction à la grande école de
la peinture » le présente comme
un génie solitaire, pauvre et incompris.
Hercules Segers est probablement le
peintre graveur Hollandais le plus
singulier du Siècle d'Or, voir par
exemple:
« L'arbre mousse »,
eau-forte
et aquarelle {Rijksmuseum
Amsterdam},
les peintures
« La rivière dans la vallée
»,
{Rijksmuseum Amsterdam} et
« Le paysage
de montagne »,
{Musée Bredius,
La Haye}.
Il était plus inspiré par la tradition
de la peinture imaginaire et fantastique
du peintre graveur allemand Altdorfer
(c. 1480, 1538) qui plaça le paysage
comme élément principal de son travail ("Epicéa",
eau-forte colorée à l'aquarelle, "Paysage
de montagne avec arbre",
peinture, "Paysage
de montagne",
peinture), que par la tradition de la
l'école flamande définie par Breughel
l'Ancien : « Peignez ce
que vous voyez ».
En tant que graveur, Segers expérimenta
des techniques de gravure (l'aquatinte
en utilisant de la poudre de colophane)
et surtout d'impression. Lorsqu'un
artiste conçoit et créer une œuvre,
il peut avoir à l'esprit de multiples
variantes de son œuvre,
voir l'extraordinaire exemple présenté
par Pablo Picasso dans le documentaire
d'Henri Clouzot, "Le
mystère Picasso" (44e minute et
suivantes). La gravure permit à Segers
de présenter les différentes variantes
de l'œuvre
qu'il était en train de créer. Il
considérait que chaque tirage pouvait
être unique et les tirages de Segers
deviennent de véritables tableaux.
Rappelons qu'en général, lorsque le
graveur a fini de graver sa plaque, il
la donne à un imprimeur qui en fait une
série de tirages identiques. Lorsqu'il
imprimait une plaque, Segers pouvait
préparer la feuille en la peignant à
l'aquarelle, en utilisant des encres de
différentes couleurs pour imprimer la
plaque, en peignant à l'aquarelle ou à
l'huile le tirage après impression, il
pouvait également imprimer sur
tissu ou
même en découpant le tirage pour obtenir
un autre format. Il réalisait des
contre-épreuves (une contre-épreuve
est le tirage que l'on obtient en
remplaçant sur la presse, la plaque de
cuivre par le tirage que l'on vient de
faire, on le recouvre d'une feuille de
papier et on en fait un tirage avec la
presse; la contre-épreuve est donc
inversée par rapport au tirage original
et les couleurs plus pâles). Nous
présenterons l'exemple de six variantes
de la gravure « Paysage à la
branche de sapin
».
Première variante: eau-forte
imprimée avec de l'encre bleu foncé sur
coton préparé avec un gris jaunâtre puis
coloré avec des variétés de brun, du
vert, du vert bleuté, du bleu grisâtre
... C'est
un très bel exemple de tirage de
Segers qui devient un véritable
tableau.
Deuxième
variante: eau-forte imprimée sur
un papier préparé couleur crème. H.
Segers utilise une plaque qu'il vient
d'imprimer et au lieu de l'encrer, il
huile la plaque puis fait un tirage,
avec le temps l'huile devient brune, {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Troisième
variante: eau-forte
imprimée à l'encre brun foncé sur un
papier préparé couleur brun violacé
{Rijksmuseum, Amsterdam}. Quatrième
variante: eau-forte imprimée
avec de l'encre bleue sur un papier
teinté en brun clair {Rijksmuseum,
Amsterdam}. Cinquième
variante: eau-forte imprimée
à l'encre noire sur
papier avec un gris clair.
Après impression le tirage
est complété avec des
aquarelles bleue et brune
{Rembrandt
House Museum, Amsterdam}.
Sixième
variante: Contre-épreuve
d'un tirage imprimé à
l'encre verte sur un coton
teinté en jaune-marron, avec
des rajouts de peinture à
l'huile
{Rijkemuseum,
Amsterdam}.
Cette
extrême singularité fit que H. Segers
ne fut pas connu du grand public mais
fut admiré par un petit cercle de
collègues peintres et graveurs dont
Rembrandt faisait partie. Notons que
Rembrandt avait également à l'esprit
les multiples variantes de l'œuvre
qu'il créait, ce qui lui permettait de
ne jamais faire deux fois le même
dessin de la scène qu'il voulait
représenter.
Même si Rembrandt et Hercules Segers n'habitèrent pas Amsterdam à la même période, Rembrandt connaissait bien l'œuvre de Segers et le considérait comme son maître. Il l'admirait pour ses recherches et sa technique exceptionnelles en gravure, son originalité, sa créativité, l'indépendance et la liberté de son style. Rembrandt possédait huit peintures, plusieurs tirages de ses gravures et même une plaque « Tobias et l'ange » d'Hercules Segers. H. Segers influença Rembrandt en peinture et gravure :
"La grande résurretion de Lazare" (c. 1632) {Rijksmuseum Amsterdam} "La
grande résurrection de Lazare"
(1632), gravure. On remarquera
que Rembrandt ne fait pas une
simple copie de la peinture,
mais refait une nouvelle
représentation de la scène.
"Le bon Samaritain" (c. 1633), {Rijksmuseum, Amsterdam}
"Le bon Samaritain"
(1633) gravure. De nouveau
Rembrandt ne fait pas une simple
copie de la peinture et bien que
ce soit une scène biblique, il
la situe à la campagne et
rajoute, au premier plan, un
chien qui fait ses besoins. Ceci
est caractéristique du côté
facétieux et provocateur de
Rembrandt. Ce thème sera repris
plus tard en peinture.
"Paysage avec le bon Samaritain" (c. 1638), {Musée Czartoryski, Cracovie}
"Paysage avec le bon
Samaritain" (c. 1638)
peinture, quelques années plus
tard, Rembrandt retraite le
thème du bon Samaritain dans un
paysage directement inspiré des
paysages d'Hercules Segers.
"Descente de croix" (c. 1632-33), {Alte Pinakothek, Münich}
"Descente de croix"
(c. 1632-33) Peinture.
Rembrandt utilise
cette scène pour
placer un autoportrait
(l'homme en bleu qui
tient le bras droit du
Christ). Il gravera le
thème un an plus tard.
"La grande descente de croix" (c. 1633), {Rijksmuseum, Amsterdam} "La
grande descente de croix"
(c. 1633) gravure. Rembrandt
utilise cette scène pour placer
un autoportrait (l'homme sur
l'échelle qui tient le Christ).
Il retraitera le thème un an
plus tard.
"Descente
de croix" (c. 1634). On remarquera les
trois manières différentes de
traiter le même sujet. On
comparera les versions de
Rembrandt influencées par
celles de Rubens, "Descente
de croix" (ca
1611-12), {Musée de
l'Ermitage,
Saint-Petersbourg}, "Descente
de croix"
(ca 1612-14),
{Cathédrale
Notre Dame
d'Anvers}, "Descente
de croix"
(ca 1616-17),
{Musée des
Beaux-Arts,
Lille}
"Tobias et l'ange" (c. 1630-33), {Rijksmusem Amsterdam} "Tobias
et l'ange", tirage
de la plaque d'Hercules
Segers que possédait
Rembrandt.
"La fuite en Egypte" (c. 1653), {Rijksmuseum Amsterdam}
"La
fuite en
Egypte"
(c. 1653).
Rembrandt a
effacé une
partie de la
plaque
d'Hercules
Segers (les
personnages de
Tobias et
l'ange), il a
gardé une
grande partie
du paysage et
la transformée
en "La
fuite en
Egypte".
"La fuite en Egypte" (c. 1653), {Rijksmuseum Amsterdam}
"La
fuite en Egypte"
(c. 1653). Ce tirage
diffère du tirage
précédent par un
essuyage moindre de
l'encre et un autre
choix de papier. On
remarquera les
atmosphères très
différentes qui se
dégagent de ces deux
tirages.
Références
Rembrandt et la technique de l'eau-forteDe nombreux peintres faisaient réaliser leurs gravures par des graveurs imprimeurs professionnels. Ils fournissaient le dessin qu'ils désiraient graver à un graveur et celui-ci gravait généralement la plaque au burin en inversant le dessin original puis il en effectuait les tirages (voir la gravure de 1642 d'Abraham Bosse qui représente un atelier d'imprimeur). Atelier d'imprimeur (A. Bosse c. 1642)
Un atelier d'imprimeur. On voit au fond
un imprimeur encrant une plaque, au
premier plan à gauche un imprimeur
essuyant l'excès d'encre sur la plaque
avant de l'imprimer et au premier plan à
droite un imprimeur qui imprime la
plaque après l'encrage et l'essuyage.
Pour Rembrandt, la gravure et
l'impression de la plaque étaient
beaucoup trop importantes pour qu'il
les confie à un graveur imprimeur.
Pour garder la liberté et la
spontanéité du trait, il utilisait la
technique de l'eau-forte et
n'inversait pas son dessin. Il utilisa
très rarement la technique du report
d'un dessin. La gravure lui permettait
de donner libre cours à son
imagination, sa fantaisie et à ses
recherches (voir l'exemple
exceptionnel d'étude de représentation
du volume dans le portrait de Jan
Cornelis Sylvius). Influencé par Hercules
Segers, Rembrandt essaya des
encres de différentes couleurs
(voir les exemples: "Le
Christ et la femme de Samaria"
(c. 1634), "La
mort de la Vierge"
(c. 1639), {Rijksmuseum
Amsterdam}, "Tobit aveugle"
(c. 1651) et "David
en prière" (c.
1652), {Rijksmuseum Amsterdam}),
et
expérimenta différents supports ou papiers
pour imprimer. Rembrandt aimait faire des tirages
sur les papiers qui venaient
de Chine ou du Japon, il
essaya même des tirages sur
parchemin.
"Le Christ chassant les marchands du temple" (c. 1635), {Rijksmuseum Amsterdam}"Le Christ chassant les marchands du temple" gravure (c. 1635), {Rijksmuseum Amsterdam}. Rembrandt réalisa ce tirage sur parchemin ! "La pièce de cent florins" (c. 1648), {Rijksmuseum Amsterdam} "La pièce de cents florins"
gravure (c. 1648). Ce tirage est un
exemple de tirage fait sur papier Japon.
Après avoir mis au
point sa technique de l'eau-forte, Rembrandt
comprit qu'en faisant plusieurs attaques
successives à l'eau-forte en utilisant un
vernis transparent, il pouvait obtenir des
ombres, des zones sombres ou des dégradés
(voir par exemple les autoportraits de la
période de Leiden et « L'homme
dessinant d'après un
plâtre »
(c. 1641), et même faire des détails et des
nuances dans les ombres ou les zones
sombres. Pour obtenir les plus beaux effets
dans les lumières et les ombres ou les
détails dans les zones sombres, Rembrandt
compléta la technique de l'eau-forte par
l'utilisation du burin et/ou de la pointe
sèche. Il
commençait la construction et le placement
des ombres et des zones sombres à
l'eau-forte, voir la plaque inachevée «
Le
dessinateur
d'après un modèle
»
(c. 1639). Citons
comme exemples de plusieurs
attaques successives à
l'eau-forte, les gravures « La
vue d'Amsterdam »
(c. 1641), « L'homme
dessinant d'après un
plâtre
»
(c. 1641), « La
femme juive (1) »
et « La
femme juive (2) » (c.
1635) , « Le
Christ devant Pilate (1) »
et « Le
Christ devant Pilate (2) »
(1635). Enfin, il travaillait la
plaque au burin et/ou à la pointe
sèche, citons
comme exemples, cinq des
plus belles et des plus
techniques gravures de
Rembrandt « L'annonciation
aux bergers
» (1634), « Le
peseur d'or »
(c. 1639), «
Les
trois arbres
» (c. 1643),
« Portrait
de J. Six
» (c. 1647) et « La
pièce de cent florins »
(c. 1648). Une gravure à l'eau-forte permet
d'effectuer entre cent et cent cinquante
tirages.
La technique de la pointe sèche
utilise une pointe en acier qui sert à
graver des traits dans la plaque de métal.
Citons deux exemples de gravures à
l'eau-forte complétées à la pointe sèche,
« La
mort de la Vierge » (c.
1639) et « Le
Christ crucifié entre deux larrons »
(c. 1641). Rembrandt utilise la pointe sèche
pour réaliser les noirs les plus intenses.
Une gravure à l'eau-forte complétée à la
pointe sèche ne permet d'effectuer qu'une
quinzaine de tirages car la pression de la
presse écrase rapidement les bourrelets de
cuivre qui est un métal peu dur. A partir de
1648 il utilisa de plus en plus la pointe
sèche dans ses gravures, et réalisa même
certaines gravures uniquement à la pointe
sèche, ce qui dérouta ses admirateurs et les
collectionneurs. Citons par exemple, les
paysages « Le
bouquet d'arbres » (c.
1652), « Le
canal » (c. 1652), et la
gravure « Ecce
homo » (c. 1655) qui n'a
été tirée qu'à huit exemplaires.
La gravure au burin utilise un burin qui sert à graver des traits dans la plaque de métal. Citons deux exemples de gravure à l'eau-forte complétées au burin, « La grande descente de croix » (c. 1633) et « Le Christ devant Pilate » (c. 1635). Une gravure à l'eau-forte complétée au burin permet d'effectuer entre cent et cent cinquante tirages. Pour travailler ses
plaques, Rembrandt pouvait utiliser un
tirage sur lequel il dessinait, voir les
exemples de "L'autoportrait au chapeau et
collerette" présentés dans la
section: La mise au point de la
technique de l'eau-forte, et le "Portrait
de la mère de Rembrandt".
Dans le cas des plaques
très compliquées, Rembrandt réalisait une
contre-épreuve sur laquelle il dessinait. La
contre-épreuve étant un tirage inversé, elle
est semblable à la gravure sur la plaque de
cuivre. Après avoir mis au point son dessin
sur la contre-épreuve, il n'avait plus qu'à le
redessiner sur le vernis de la plaque pour
obtenir le nouvel état de la plaque. Il existe
très peu d'exemples de ce type. C'est le cas
de la contre-épreuve du premier état de la
plaque "Le peseur d'or" {The Baltimore
Museum of Art}.
S'il le jugeait
nécessaire, Rembrandt pouvait effacer une
partie de la plaque au brunissoir-grattoir.
Il utilise la partie grattoir (en forme de
triangle dont les bords sont coupants) qui
permet d'enlever les bourrelets de métal et de
gratter le cuivre autour des traits, puis la
partie brunissoir (arrondi et lisse) qui
écrase le cuivre et efface les restes des
traits gravés et les rayures faites par le
grattoir. Cette opération est très longue et
difficile car les plaques utilisées par
Rembrandt étaient peu épaisses. Il peut
changer une grande partie de la plaque pour la
retravailler et modifier fortement le
traitement du sujet. Citons par exemple,
« L'autoportrait
au chapeau et collerette » (c.
1631) (réalisation des broderies, avant
et après),
puis beaucoup plus tard les grandes
modifications, « La
fuite en Egypte »
en utilisant une plaque
d'Hercules Segers de c. 1630-33, « Les
trois croix » (c. 1653), premier
état et quatrième
état et « Le Christ présenté au
temple » (c. 1655), troisième
état et septième
état. Effacer une partie d'une plaque au
brunissoir représente un travail considérable
et montre que pour Rembrandt seul compte le
résultat qu'il voulait obtenir indépendamment
de la quantité de travail qu'il devait fournir
pour atteindre le but qu'il s'était fixé.
Pour Rembrandt, il
n'existe aucune règle prédéfinie, seul
compte le résultat qu'il veut atteindre. Il
adapte les règles et la technique qu'il
utilise au sujet qu'il traite et en fonction
du résultat qu'il veut obtenir.
Après sa mise en faillite, la saisie de sa presse et son déménagement en 1660, il ne put pas réinstaller un atelier de gravure aussi bien équipé et ne produisit que deux gravures. Contrairement à Albrecht Dürer, Rembrandt ne grava jamais sur bois, très probablement parce que la gravure sur bois n'offre pas la liberté du trait que permet la gravure à l'eau-forte.
Des progrès importants furent réalisés au
cours des siècles lorsque les alchimistes
utilisèrent les exsudats secrétés par
certains végétaux (un exsudat est la
substance qui s'écoule à l'extérieur du
végétal, par exemple la résine du pin) et
les distillèrent. L'utilisation de résines
ainsi que la distillation sont connues
depuis l'antiquité. Pline l'Ancien (23,
79) rapporte qu'on extrayait la
poix liquide par
distillation de la résine du pin cembro ou
de l'épicéa ainsi que d'arbres orientaux
comme le térébinthe, le lentisque, le
cyprès. Cette poix liquide était employée
en Égypte pour la momification des corps.
La poix liquide peut être réduite au feu
et coagulée au vinaigre, et servait alors
à imperméabiliser les amphores. Les Grecs
calfataient les navires avec de la poix
mêlée de cire et ils utilisaient également
la distillation pour obtenir des liqueurs.
Le premier alambic est décrit au IVe
siècle (alambic
de Zosine, alchimiste Grec), au
cours des siècles suivants la distillation
est utilisée pour purifier et obtenir de
nouveaux produits, l'alcool éthylique
(appelé « eau de vie » ou
« eau ardente » au moyen âge),
les huiles essentielles (appelées
également essences végétales), les esters
utilisés en parfumerie ... La distillation
du pétrole est connue dès le VIIe siècle.
En 1500, l'alchimiste allemand Jérôme
Brunschwig (c. 1450, 1512) publie le
premier traité consacré à la distillation.
Parmi les exsudats utilisés citons :
Unités
Les unités utilisés dans ce
paragraphe sont :
GravurePour la fabrication :
Du mastic en larmes pulvérisé. La résine mastic est tirée du pistachier lentisque (arbuste méditerranéen appelé le lentisque Pistacia lentiscus ou l'arbre au mastic). Elle est utilisée pour fabriquer le vernis dur transparent utilisé par J. Callot mais également pour fabriquer des vernis mous, des médiums oléo-résineux et des vernis en peinture à l'huile. Cette résine était la résine favorite de P. P. Rubens. La variété khia ou chia, de l'île de Chios en Grèce, est la plus réputée depuis l'Antiquité. a) L'essence de térébenthine est utilisée comme solvant pour fabriquer en gravure le vernis dur utilisé par J. Callot et certains vernis mous, et en peinture à l'huile des médiums et des vernis. b) La colophane également appelée poix blanche est connue depuis l'Antiquité. Elle est utilisée en gravure pour la fabrication de certains vernis mous, et en poudre pour réaliser des aquatintes.
En gravure, elle est utilisée pour construire un petit rempart sur le bord de la plaque, puis après avoir placé la plaque à l'horizontal sur une table, on verse l'acide sur la plaque, et pour la fabrication des vernis mous, en peinture elle est utilisée pour la fabrication de vernis mats. De l'ambre ou du spalt calciné (bitume calciné). a) L'ambre est une résine fossile secrétée il y a des millions d'années par des conifères ou des plantes à fleurs. Il en existe différentes couleurs. L'ambre est utilisée en gravure pour la confection de vernis mous, et en peinture à l'huile pour la fabrication de médiums, de vernis et des glacis (L'ambre était prisée par Salvador Dali pour réaliser les glacis). L'ambre est connu depuis la préhistoire (paléolithique: ambre trouvé dans la grotte d'Altamira en Espagne) pour la confection de bijoux (Halistattien, entre 1200 et 500 avant JC) . b) Le spalt est une pierre dont les fondeurs se servent pour mettre les métaux en fusion. Mais c'est le nom utilisé par les artistes peintres et graveurs pour désigner l'asphalte ou le bitume (de Judée). Le bitume existe à l'état naturel sous forme de résidu d’anciens gisements de pétrole dont les éléments les plus légers ont été éliminés par évaporation au cours du temps par une sorte de distillation naturelle. Le bitume est connu et utilisé depuis la préhistoire comme matériau d'étanchéité pour sceller les briques de terre cuite, pour la fabrication d'outils ou le calfatage des bateaux. Le bitume est utilisé en gravure pour la fabrication de vernis mous mais également pour réaliser des aquatintes lorsqu'il est réduit en poudre. Du mastic (voir la fabrication du vernis dur de J. Callot). De la poix résine (ancienne orthographe : « poix raisine ») ou de la poix de cordonnier. La poix est obtenue principalement par distillation de la résine brute du pin et est utilisée dans la constitution de certains vernis mous. C'est une matière collante, visqueuse et inflammable à base de résines et de goudrons végétaux, elle est surtout utilisée pour assurer l'étanchéité de divers assemblages. Il existe de nombreuses variétés de poix en fonction de leur mode de préparation et des variétés d'arbres dont on extrait la résine. La poix est connue et utilisée depuis l'Antiquité. a) La poix résine est obtenue en émulsionnant le résidu de la distillation de la térébenthine (colophane) avec de l'eau (Si au lieu de soutirer la colophane de l'alambic on la brasse fortement avec de l'eau, on lui fait perdre sa transparence: elle porte alors le nom de résine jaune ou poix résine). b) La poix de cordonnier qui est de la poix noire est obtenue par distillation de la résine de certains résineux ou du bouleau puis par combustion lente des débris résineux. Là elle se sépare en deux parties, l'une liquide qu'on nomme huile de poix, l'autre plus solide c'est la poix noire. c) La poix blanche désigne la colophane obtenue par distillation de la résine térébenthine. d) La poix de Bourgogne ou poix des Vosges est obtenue par distillation de la résine de l'épicéa. e) La poix naturelle est produite par distillation de la résine du Mélèze. Peinture
Références
|